Les chants

Les chants

Les chants

 

Les chants apportent une complémentarité à l’orchestre, mais surtout ce sont eux qui transmettent les messages. On y raconte des choses diverses : conseils, allusions, provocations, messages politiques, traditions, prouesses, chutes, mésaventures, empreinte du passé, mythes, révoltes, vie quotidienne, enseignements de la vie, l’histoire de l’affranchissement de la liberté, esclavage, guerre, ainsi que des choses plus actuelles qui arrivent dans la vie ou dans la roda.
Dans la Capoeira, ce sont eux qui ont le rôle historique, ils montrent l’empreinte du passé et l’importance de la transmission de la mémoire collective. Les textes sont traditionnellement improvisés et sont donc la porte ouverte à la créativité et à la libre expression.
Tout comme les autres instruments, ils doivent bien se combiner avec le berimbau du maitre.

Dans la capoeira, les textes doivent respecter le style esthétique de chaque chant : le style parlando rubato (dans les ladainhas et chula), clameur (le choeur dans les chulas et corridos), ou encore chanté (les corridos et cantiguas), mais aussi les rimes, les degrés importants, les modes,.. Chaque chant a un modèle mélodico-rythmique qui le caractérise, et correspond la plupart du temps à une forme rondeau. Les gammes pentatoniques et tétratonales reviennent toujours (chulas et corridos), en appuyant les fondamentales et les premiers harmoniques (5te, 3ce, et 4te).
Mais au final, on retrouvera souvent la même base, car ce sont des modèles ancrés dans la mémoire, inscrits dans la tradition orale.

Il y a plusieurs sortes de chants dans la capoeira :

LES LADAINHAS

Ce « Canto d’encada » (chant d’entrée) est une longue louange aux maîtres de la capoeira et à l’histoire, un cantique, joué et chanté par un soliste, en général le plus considéré ou le plus vieux et qui présente le début de la roda. Toutes les ladainhas sont basées sur le même schéma mélodique. C’est une prière lente, souffrante, douloureuse, progressive, accentuée par les legatos, les glissandos, les oscillations, le style parlando-rubato, les très petits intervalles mélodiques, et les longues accentuations, un jeu musical de virtuose developpé à partir d’une mélodie très restreinte, mais où il n’y a aucun jeu physique dessus car on demande la plus grande concentration. Ce sont des vers entremêlés par de courts refrains répétés par le choeur. Le ladainha est issu du répertoire liturgique catholique (des chants grégoriens) au niveau modal (on utilise les 1er et 2ème degrés), de la poésie populaire dans les variations improvisées, et africaine dans ses évocations orales. Il y a donc une symbolique, étroite mais puissante.

Les ladainhas sont des chants spécifiques de la capoeira Angola. Généralement chantées au début de la roda elles peuvent évoquer les capoeiristes du passé ou raconter une histoire. Seuls le(s) berimbau(s) accompagnent la ladainha, les autres instruments n’entrent que lorsque les choeurs commencent ; « Iê viva meu Deus ». Il n’y a pas de jeu pendant la ladainha ; le début du jeu est signalé par la phrase « Iê, vamos embora camarada ». C’est toujours un moment de receuillement et d’émotion.

LES CHULAS

C’est un chant populaire de salutation, qui suit le ladainha, de contenu improvisé, et qui donne le départ du jeu (chant d’ouverture). C’est une forme de louange responsoriale. Ce cantos est plus mystique, plus rituel, car on provoque l’action tout en ressentant l’imploration aux divinitées. Il énonce les fondamentais (aspects moraux et spirituels). Ce chant est fondé sur les gammes pentatoniques et tétratonales. Il commence souvent par les fameuses paroles codifiées « Iê, viva meu deus » ou « Iê viva meu mestre » (ce qui ramène au candomblé). Le choeur reprend chacune des paroles du soliste en terminant par « camara »* (ce terme est l’expression de la solidarité, de l’état d’égalité de chaque participant devant la roda).

LES QUADRAS (Les quatrains)

Les quadras ressemblent beaucoup au corridos, ils sont généralement utilisés pour initier les rodas de capoeira régionale. Elles jouent en quelque sorte le rôle des ladainhas dans la capoeira Angola : ce sont de courtes strophes de 4 vers simples (très faciles à retenir), et dont une phrase est reprise aussi par le choeur, mais ici le rythme ne s’accélère pas. Les textes sont moqueurs, ou avertissent, mais peuvent aussi relater de légendes, de la vie de personnages importants, de scènes de vie patriarcale du Brésil, et autres motifs variés.
Chaque refrain se termine par un appel au coeur (soit par « camara », soit par « camaradinha » (petit camarade) soit par « arundé », ou encore par  » Iêê ».)

LES CORRIDOS

C’est le chant le plus courant, de forme responsoriale entonné tout de suite après la chula. Il y a beaucoup de métaphores, c’est une provocation au régime des maîtres des champs. Un soliste chante plusieurs vers, puis le choeur reprend une courte phrase du refrain (forme cyclique alternée), ainsi de suite, en s’accélérant de plus en plus, ce qui donne une impression d’énergie grandissante. C’est une forme très entraînante et rappelle les chants au travail (les esclaves s’encouragent mutuellement), qui donne de l’importance au choeur, à l’ensemble. Il s’établit un jeu de questions-réponses avec le choeur.
Les rythmes principaux sont Sao Bento Grande, Cavalaria, Amazonas, Sao Bento Pequeno : ce ne sont que des rythmes rapides, ou qui commencent lentement puis qui s’accélèrent.

LA SAMBA DE RODA

La samba de roda est une manifestation festive populaire mêlant musique, danse et poésie. Il s’agit d’une variante de la Samba, la danse emblématique du Brésil, qui se pratique à l’intérieur d’une ronde (roda) similaire à celle de la Capoeira. Elle clôt généralement la roda. Un couple de danseurs s’y fait face, dansant comme s’il s’agissait d’une séduction, jusqu’à ce qu’un nouveau danseur vienne « chasser » l’homme, avec humour et imagination, par exemple en lui faisant signe d’aller voir ailleurs ou en le repoussant d’un coup de hanches. La même mise en scène se produira si une nouvelle danseuse veut entrer. La chorégraphie, souvent improvisée, est fondée sur des mouvements des pieds, des jambes et des hanches.
C’est une danse entraînante faite de pas très rapides, dont le meilleur enseignement reste l’observation et l’imitation … toutes les personnes présentes, même les novices, sont donc instamment invitées à se joindre à la ronde. Elle se pratique au son des instruments habituels de la Capoeira auxquels s’ajoute parfois le cavaquinho (guitare brésilienne). Toutefois elle est fréquemment pratiquée en dehors de la Capoeira.
On estime son apparition au XVIIe siècle dans l’état de Bahia. A l’origine, les paroles des chansons accompagnant la Samba de Roda étaient souvent improvisées en même temps que la musique ; elles traitaient le plus souvent des origines africaines des artistes et de leur mode de vie au Brésil, mais tous les thèmes pouvaient être abordés. En 2005, l’Unesco a proclamé la Samba de Roda chef-d’oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité.

LE MACULELE

Le Maculelê est une danse afro-brésilienne ou les danseurs se regroupent dans un cercle (roda de Maculelê) avec un ou plusieurs atabaques placés à l’entrée du cercle. Chaque danseur brandit une paire de bâtons (traditionnellement faits à partir de biriba du brésil) appelée grimas. La dance est rythmée par un « maitre » ou lorsque celui ci chante, les danseurs dans le cercle répondent en chantant les chœurs des chansons. Au signal donné par le maitre, deux personnes entrent dans le cercle et jouent au rythme de l’atabaque. Sur les 3 premiers temps, elles effectuent des mouvements athlétiques et acrobatique tout en frappant sur leur bâtons et sur le quatrième les deux joueurs tapent sur un bâton de leur partenaire au dessus de leurs têtes. De manière formelle, il y a trois atabaques : le Rum, le plus grand qui joue le rythme appelé Barravento ; le Rumpi, atabaque moyen, qui joue le rythme Congo de Ouro et le Lê, le plus petit qui joue le rythme appelé Ijexa. L’agôgô et le Caxixi peuvent également accompagnés le rythme. Cependant, on peut également voir le Maculelê dansé au rythme d’un seul atabaque qui jouera alors Congo de Ouro ou Barravento pour un rythme plus rapide.

Il semble être une évolution de la cucumbi (ancien jeu des noirs) jusqu’à obtenir un mélange de danse et jeu de bâtons, appelés grimas (escrime), avec lesquels les participants attaquent et se défendent. Dans un degré de plus grande difficulté et d’audace, le maculelê peut se danser avec des machettes à la place des bâtons, ce qui donne un joli effet visuel par les étincelles qui jaillissent à chaque coup. Néanmoins, les origines du Maculelê sont aussi obscures que celles de la capoeira, et il ya beaucoup d’histoires, théories et croyances qui clament : »c’est ainsi qu’est né le Maculelê ». Ce qui est sûr, c’est que le Maculelê est une danse afro-brésilienne originaire de la région du Recôncavo Baiano et plus particulièrement de la ville de Santo Amaro da Purificação.